Naab Xendel - Un non-maître parmi tant d'autres.

Naab est né et a grandi dans un petit village, perdu dans les montagnes de Somorgen. Sa famille n'était pas bien riche, loin de là, ne vivant uniquement que du travail du paternel, bûcheron. Voie que l'aîné aurait dû suivre, si le destin en avait voulu ainsi. A vrai dire, le garçon avait appris le métier auprès de son père, heureux de pouvoir passer du temps avec lui, malgré les muscles endoloris, tant par le maniement de la hache, que des journées interminables de travail, tout comme ses ampoules qui apparaissaient encore et encore au creux de ses mains. L'idée ne le dérangeait pas plus que ça à vrai dire, mais, ce travail éprouvant ne rapportait que trop peu d'argent et, ses deux parents ne semblaient s'arrêter de vouloir faire des enfants, comme s'ils ne trouvaient pas d'autre occupations que … Enfin, vous voyez. Au final, la famille Xendel était composée de neuf frères et sœurs ce qui, vous l'imaginerez, devint rapidement très difficile, au vu des revenus de l'homme de la maison. Tant et si bien que tous, manquèrent cruellement de tout, nourriture, habits, soins et, ironiquement, bien vite de bois pour se chauffer. L'aîné de cette interminable fratrie décida bien vite de partir de la maison, non pas lassé par les agissements de ses parents, mais plus pour alléger le fardeau des siens. Régulièrement, pour s'amuser plus qu'autre chose, Naab se bagarrait avec les enfants de son âge, plus pour comprendre comment se défendre qu'autre chose. Après tout, la vie dehors n'était pas des plus simples et, pour lui qui était né sans la moindre once de pouvoir, cela serait encore plus difficile. Fort heureusement, il avait eu la chance d'être grand et doté d'une grande force, en grande partie grâce au métier de bûcheron exercé depuis qu'il était en âge de pouvoir attaquer le bois. Deux fois par an, il y avait un concours de lutte dans son village, une petite fête était organisée autour et, le vainqueur remportait un cochon. Cela pourrait faire rire les plus fortunés d'entre-vous mais, une telle bête suffisait à nourrir la famille entière un petit moment, s'ils se rationnaient convenablement.

Ainsi, rapidement, ce cochon devint une des priorités du grand-frère. Il s'entraînait régulièrement avec son père, ses frères, ou même le peu d'anciens soldats présent dans le village. Au fil des années, notre homme se découvrit un instinct particulièrement développé, sur ce qui touchait au combat, en premier lieu. Régulièrement, Naab avait cette sensation de ne pas devoir faire ce genre de choses ou encore, cette pensée furtive qui lui disait « et si tu attaquais sur ta gauche ? ». Force était de constater que, le fils de bûcheron finit par écouter cette voix, qui se faufilait de plus en plus dans son esprit et, cela lui apporta bien vite un avantage sur ses adversaires, lui faisant remporter de plus en plus de cochons, ce qui aida grandement la famille. Mais, avec les naissances qui semblaient ne jamais cesser, cela devint bien vite insuffisant et, à tout juste dix-sept ans, l'aîné décida de quitter la maison, comme évoqué un peu plus tôt. Récupérant sa hache, il s'aventura sur les routes, découvrant un monde inconnu et parfois hostile où, sa vie faillit lui être arrachée à de nombreuses reprises. Sa hache fendit ses premiers crânes, ce qui le marqua profondément, mais, il s'avéra que cette petite voix et, sa force acquise durant d'interminables séances à abattre des arbres, lui offraient un certain avantage. Oh, n'allez pas imaginer qu'il était un prodige où je ne sais quoi. Il se fit malmener plus d'une fois, dépouillé et tabassé mais jamais il n'abandonna. Ses défaites ne lui firent comprendre que de mieux en mieux comment se servir de cette hache, comment frapper plus efficacement, comment mettre à meilleur profit cette force que la nature lui avait offerte, en contre partie d'un quelconque pouvoir.

Enchaînant les petits boulots sans réel succès durant trois ans, il rendait régulièrement visite aux siens pour leur donner les maigres économies qui restaient pour aider comme il le pouvait ses parents. Et puis, un jour, au détour d'un chemin, alors qu'il se fit prendre en chasse par des brigands, il reçut l'aide inespérée d'un groupe d'hommes armés, qui se révélèrent être des mercenaires et qui l'embauchèrent. Meilleur salaire, bien meilleur, mais aussi enfin une profession où il pourrait mettre à profit le peu d'aptitudes qu'il avait vraiment. Cela lui permit aussi de s'entraîner quotidiennement, jusqu'à ce que la fatigue lui fasse mettre genoux au sol, contre des combattants expérimentés, ce qui lui fit franchir un cap qu'il pensait inimaginable. Bien vite, il put s'acheter du meilleur équipement, troquant sa vieille hache de bûcheron contre une hache de guerre double, qui semblait mieux lui convenir. Parti comme simple troufion, Naab grimpa les échelons au fil des années jusqu'à devenir officier de la troupe. Ce fut d'ailleurs pendant un de ses voyages en leur compagnie, qu'il rencontra sa femme. Une femme belle comme l'aurore, à la chevelure flamboyante et au regard … Oh ses yeux, il ne s'en serait jamais lassé,  deux magnifiques émeraudes dont il n'eut jamais les mots pour les décrire. Douce, souriante et chaleureuse. Ce fut le coup de foudre, instantané. Il retourna la voir, plusieurs fois, lui offrant à chaque fois des cadeaux, qui, d'un point de vue extérieur, semblaient particulièrement idiots. Pourtant, la chose fonctionna, contre toute attente et … Il y eut un mariage, puis une naissance. Un garçon, puis, très vite une petite fille.

Naab était le plus heureux des hommes mais, pourtant, après quelques années passées dans ce qui sembla être pour lui un paradis, il y eut ce drame. Un soir, il rentra chez lui pour y découvrir ses corps mutilés et violés. Tous. Sa jeune fille n'avait que sept ans et pourtant, cela ne les en avait en rien empêché de … Ce jour-là, une partie de lui se brisa, s'arracha et s'évapora. Une tristesse tellement grande que seule cette haine, cette rage et cette soif de vengeance pouvait surpasser. Il remua ciel et terre pour retrouver ceux qui avaient fait ça et, il s'avéra que c'était en rapport avec une de leur missions précédentes. Naab et trois hommes avaient été envoyés déloger un petit groupe de brigands qui sévissaient dans une forêt. Ils pensaient les avoir tous exterminés mais, il s'avéra qu'un petit groupe n'était pas présent durant l'assaut et, ces derniers étaient revenus se venger. Ce qu'il leur fit quand il les retrouva, notre homme n'en parla à personne, jamais. Il mit de côté son esprit, son humanité et son cœur, pour laisser parler cette bête enragée et assoiffée de sang qui hurlait au fond de lui. Il les tortura, des jours durant, leur faisant subir le pire des supplices, si bien que, lorsqu'il en eut finit avec eux, il fut particulièrement difficile de déterminer si cet amoncellement de chair, de peau, d'os brisé et de sang était humain ou animal.

L'ironie de la chose, c'était que sa défunte femme, depuis quelques mois, lui demandait d'arrêter son activité, ne souhaitant pas que ses enfants ne grandissent sans un père. Elle avait songé à monter une auberge, en famille, à Brildell, sa ville natale. C'était sans doutes, là, la plus difficile des choses, de se dire que cette fois, son instinct l'avait trahi, que cette fois-ci, il aurait du écouter les conseils. Sans cela, il serait encore heureux, vivant une vie tranquille et paisible. Alors, voulant respecter le vœu de sa chère et tendre, Naab quitta sa troupe pour acheter la fameuse auberge et, un seul nom lui vint, Daena, celui de celle qui avait ce rêve. Il laissa sa hache, dans un cadre, au dessus du comptoir et son commerce naquit, petit à petit. Faire de si longues et éprouvantes journées lui permit de penser à autre chose, le faisant doucement, très doucement, retrouver un semblant de vie. Cette auberge, bien vite, se mit à vendre des informations. De part sa longue carrière sur les routes, notre homme avait gardé de nombreux contacts à droite et à gauche et, nombreux étaient ceux, prêt à offrir quelques pièces pour entendre des histoires, des rumeurs, ou des drames que le nouvel aubergiste avait pu entendre dans son établissement où les voyageurs étaient nombreux.

Quel est l'élément que tu maîtrises ? Comment te sens-tu vis à vis de cet élément ?
Que dalle. J'ai rien eu. Mes frangins et mes frangines ont tous eus un pouvoir, tous lié à la terre. Je suis le seul à m'être fait baiser par la nature, à ne rien avoir. Avec le temps, j'ai appris à n'en avoir rien à foutre, mais quand j'étais gamin ça m'a vraiment travaillé. J'étais sûr d'être une erreur de la nature ou une connerie comme ça. Mais au final, j'ai appris à faire sans et c'est pas plus mal. Quelque part, c'est une force que de devoir compter que sur ses mains et rien d'autre, j'ai pas de risque de panne au moins. Alors ouais, plusieurs fois, on s'est foutu de ma gueule pour ça, j'ai toujours répondu avec un bon gros crochet du droit bien dans le nez. En général ça calme tout le monde. J'vais vous dire, des mecs qui avaient des pouvoirs, j'en ai dégommé des tas, tellement que j'ai arrêté de compter. Des mecs qui savaient se battre, à l'épée et avec leur magie. Ça m'a jamais empêché d'y survivre, de pas en avoir, bah voilà. Je le vis bien, très bien même.

Que penses-tu du traité de paix qui a été signé entre les régions ? Que ressens-tu envers les personnes qui manient un élément différent du tien ?
C'est une bonne chose, la paix. J'ai toujours trouvé ça particulièrement con. Très con même, de vouloir cogner son voisin, juste sous prétexte qu'il est différent. Et pour ça, oh putain que j'connais. Non-maître, avec ma couleur de peau, ça, bordel, pour être différent je l'ai toujours été. Alors, y'a toujours eu des connards qui ont voulu se moquer, me cogner. Mais là, j'me laisse pas faire et, j'peux vous dire que j'cogne fort. Je raconte ma vie, on s'en fout, pardon. Donc, ouais, la paix c'est une bonne chose. J'pense que les pays vont avancer en apprenant de leur voisins puis, tant qu'il n'y a pas de vraie raison de se mettre sur la tronche, autant éviter non ? Votre seconde question est … Très conne elle aussi. Ouais bah, vous l'savez que j'suis un non-maître. Alors comment vous voulez que je vois ceux qui ont un élément différent du mien ? J'en ai rien à foutre, complet. Contrairement à tous les gros cons qui promènent un peu de partout, j'me fie pas à ce genre de conneries. Faut voir la personne, en tant que telle et pas s'arrêter à sa couleur, son origine ou son don. Puis bon, j'suis commerçant moi hein, si j'commence à dégager des clients juste parce qu'ils manient un élément que j'aime pas, j'perds un bon pourcentage, autant éviter.

Que penses-tu des égalitaristes et de la cause qu’ils défendent ?
J'pense que … L'idée de base est bonne. Faire en sorte que ceux qui se sont fait baiser à la naissance, aient une chance de foutre quelque chose de leur vie, bah … On peut difficilement être compte dans ma situation. De base, j'ai jamais vraiment compris tout … Tout ce cirque autour des pouvoirs. Qu'est-ce qui justifie qu'un non-maître ne soit pas autorisé à avoir un poste bien placé ou à responsabilités ? Qu'est-ce que la tête a à voir avec le pouvoir qu'on possède ? Ma main à coupé que dans les gouvernements il y a des brochettes de très gros cons, avec des pouvoirs, forcément, mais qui sont là juste parce qu'ils sont le fils de j'sais pas qui. Ça change rien au fait que ce soit des bons à rien qui foutent la merde. Derrière, faut d'autre petits cons qui passent faire le ménage. Le truc qu'il faut c'est une méritocratie. J'en ai rien à carrer qu'une personne soit de la Terre, de l'Air ou de rien du tout. T'es bon, t'es pas bon, on passe à autre chose. Alors ouais, ces gars essaient de faire bouger les choses et, je leur souhaite bon courage. Le problème, c'est que dans des machins comme ça, il y a toujours des petites merdes qui veulent foutre la merde et frapper au lieu d'essayer d'arranger les choses comme il faut. Ça, j'suis sûr que ça va finir par arriver et, ce jour-là, on sera tous dans la merde.