Lachlan Thralmur, non-maître

ɤ vivre dans une famille de maîtres de l'eau autoritaires axés sur une éducation stricte n'a jamais été facile pour Lachlan et sa grande soeur. Leur rang et leur richesse ont toujours été le prétexte pour lequel ils devaient montrer une attitude irréprochable, obéissant sans le moindre doute à ceux qui leur avaient donné la vie, et qui leur donnaient pourtant toutes les raisons du monde de vouloir quitter cette même vie. ɤ Compte tenu de leur facilité financière, l'union des deux enfants de la famille avec d'autres partis intéressants avait été décidé dès leur naissance afin de sauvegarder la richesse de la famille. Pour favoriser les ménages qui se formeraient dès la fin des études des futurs mariés, les quatre enfants grandirent ensemble et par la force des choses, ils devinrent amis très vite, chacun comprenant plus ou moins ce qui les attendait. ɤ Si Lachlan n'était pas certain, du haut de ses six ans, des sentiments qu'il ressentait envers sa future promise, ne sachant s'il la considérait comme une amie ou une amoureuse, celle-ci le suivait partout où il allait, les yeux écarquillés d'admiration. Alors qu'elle se mettait à développer son pouvoir, insensible au froid mordant qui paralysait tout le continent, les doutes s'infiltraient peu à peu sous la surface du futur non-maître, tandis qu'il assistait, impuissant, à la tombée en désuétude de sa soeur, qui se révélait être décevante aux yeux de sa famille, et aux yeux de la famille de son futur époux. ɤ De fil en aiguille, la promise de Lachlan fut la première à deviner ce qu'il était — ce qu'il n'était pas. Silencieuse, probablement victime d'un véritable amour, elle garda le secret, espérant vainement se tromper. ɤ Quand les deux enfants du couple se révélèrent être finalement tous deux des non-maîtres, leur besoin de quitter la demeure familiale se concrétisa. Presque rejetés par leurs parents, mais aussi par les autres habitants d'Isvann qui avaient jusqu'à oublié leur existence, ils ne trouvèrent refuge que dans un bateau de marchandise grâce à l'aide de la promise de Lachlan, sans que le propriétaire n'en soit au courant, et au petit matin qui suivit, celui-ci faisait déjà route vers un autre continent, promettant une nouvelle vie, un nouveau départ. Pourtant, le jeune garçon n'oublia jamais cette petite fille qui avait risqué le courroux de sa propre famille pour aider quelqu'un qu'elle ne verrait plus jamais. ɤ s'ils étaient d'accord pour quitter leur ancienne vie, la destination était un fort sujet de discorde entre eux. L'un voulait rejoindre la belle capitale qu'était Ealdor et qui promettait de pouvoir tout recommencer. Avec les pièces d'or blanc qu'ils avaient volé à leur famille avant de mettre les voiles, ils avaient les moyens de s'acheter une maison mais aussi un commerce pour pouvoir vivre sans dépendre de quelqu'un d'autre. Cependant, l'autre ne pensait pas de la même manière ; sa soeur voulait en profiter pour voyager, pour découvrir le monde. Malgré leur très jeune âge, ce désaccord signa leur séparation, et alors que Lachlan n'avait que onze ans à peine, chacun suivit sa route sans un regard en arrière. ɤ une fois la fortune qu'ils s'étaient accaparée divisée en deux, Lachlan se retrouva avec trop peu pour ce qu'il désirait faire. Pour la première fois de sa vie, il dut se mettre au travail, et une fois arrivé sur le sol de la belle capitale d'Ealdor, il se trouva un boulot auprès des paysans de la ville, à l'extérieur des fortifications. Face à la détresse du jeune garçon, on lui offrit un logement insalubre dans les bas-fonds de la ville, non trop éloigné de son lieu de travail, et avec une partie de son maigre salaire, il parvint à se trouver des vêtements, des vivres. Et si parfois, allongé sur sa paillasse sale, il se demandait si sa soeur était toujours vivante, la fatigue l'écrasait trop vite pour que sa pensée ne devienne trop noire. ɤ son travail dans les champs transforma son corps frêle de petit garçon en un corps d'homme, dont il profita allègrement. Si son boulot lui rapportait de quoi se nourrir sans avoir peur du lendemain, il ne lui permettait pas de mettre assez de côté de sorte de pouvoir enfin réalisé ce qu'il avait toujours voulu depuis son arrivée dans la capitale. Ce fut une discussion avec un de ses collègues qui lui donna une solution toute trouvée ; avec son corps devenu fort par les heures passées à soulever la terre, il avait toutes les compétences pour se faire quelques pièces dans les combats clandestins qui secouaient une partie de la ville, dans la nuit. ɤ tout ne se passa néanmoins pas comme prévu. Manquant d'expérience certaine, ses premiers combats le mirent au sol, et il faillit presque perdre son boulot. Ce fut un homme d'une cinquantaine d'années, les cheveux gris mais les yeux pétillants à chaque fois qu'il parlait des combats, qui lui apprit à se battre, à placer les bons coups au bon moment. Grâce à lui, Lachlan parvint à vaincre son premier adversaire dans ce qui fut le début d'une série de victoires, qui lui amenèrent un certain confort financier. ɤ vers ses vingt-sept ans, plus de quinze ans après son arrivée à Ealdor, il eut enfin les moyens de s'acheter un petit immeuble dans le quartier portuaire, qu'il transforma en auberge dont le rez-de-chaussée se trouvait être une taverne ouverte à tous, et Lachlan mit fin à ses allers-retours vers les champs pour se consacrer à son nouveau travail. Si les débuts ne furent pas très florissants, le retour de sa soeur changea la donne.  ɤ Celle-ci se présenta à lui après avoir entendu parler du grand brun qui fracassait tout le monde dans les combats clandestins. Après avoir passé plus de quinze loin l'un de l'autre, chacun dut réapprendre à vivre ensemble, mais l'aide qu'elle lui apporta à l'auberge permit au commerce de se développer et d'amener l'or qui lui manquait jusqu'alors. Face à ces pièces qui rentraient dans la caisse, Lachlan leva le pied sur les combats clandestins, sans jamais vraiment les quitter.

Quel est l'élément que tu maîtrises ? Comment te sens-tu vis à vis de cet élément ?
Lachlan n'a jamais maîtrisé d'élément. Si aux premières années de sa vie, cette absence de pouvoir lui en a fait voir de toutes les couleurs, notamment vis-à-vis de sa famille et de son avenir tout tracé, il a depuis tracé un trait sur le manque qu'il pensait ressentir. Même si tout n'est pas aussi facile que pour un maître, il est convaincu qu'il n'aurait jamais eu la vie qu'il désirait vraiment s'il s'était trouvé une aisance avec un des quatre éléments.

Que penses-tu du traité de paix qui a été signé entre les régions ? Que ressens-tu envers les personnes qui manient un élément différent du tien ?
Il n'avait jamais été aussi soulagé de savoir que les frontières étaient ouvertes, alors qu'il était brinquebalé dans un cageot du bateau qui quittait Uetrir et sa famille détestable. Ce traité, ça a été sa promesse de pouvoir quitter un endroit qui refusait les gens comme lui, comme sa soeur, et qui lui certifiait un nouveau départ là où les gens ne feraient probablement pas attention à lui. Il n'ose pas imaginer ce que ça aurait été si on l'avait découvert dans le bateau, voyageant illégalement alors qu'il n'était encore qu'un gosse sans argent, et sans pouvoir.
C'est sûrement en raison de cette absence de don qui fait qu'il accepte plus facilement les autres, peu importe leur pouvoir. Un contrôle d'élément ne façonne pas l'identité d'une personne.

Que penses-tu des égalitaristes et de la cause qu’ils défendent ?
Pour être un non-maître, Lachlan sait ce qu'ils peuvent ressentir. Ne pas être élevé au même rang que les maîtres est parfois handicapant, parfois rageant. Parfois, face à l'injustice dont les siens sont victimes, il se demande s'il ne devrait pas ajouter sa propre pierre à l'édifice et rejoindre ces égalitaristes, afin d'aider ceux qui en ont besoin. Cependant, avec ses oreilles traînantes dans sa taverne, il a entendu parler d'un corps plus dangereux que les égalitaristes, et même s'il peut comprendre leurs volontés, il ne peut accepter leur façon de faire...